Récit : à Saint-Etienne un conseil municipal sous haute tension

Une enquête explosive

Le 26 août, Mediapart publie un article intitulé Sexe, chantage et vidéo : l’odieux complot. Dedans on y apprend que Samy Kéfi-Jérôme, l’adjoint à l’éducation et à la jeunesse, avec l’aide de son ancien compagnon Gilles Rossary-Lenglet, aurait piégé le premier adjoint Gilles Artigues. Il aurait été filmé à la fin de l’année 2014 avec un escort gay en train de le masser. Une vidéo qui aurait permis à Gaël Perdriau, le maire de Saint-Etienne avec l’aide de son directeur de cabinet Pierre Gauttiéri de contenir l’influence de Gilles Artigues. La vidéo aurait été payée 50 000 euros par le biais de subventions municipales.

Des réactions opposées

Dès le premier article de Mediapart, le groupe de gauche Saint-Etienne Demain dénonce des « méthodes de barbouzes » et précise que « si ces faits sont avérés, il ne serait pas imaginable que le premier magistrat puisse rester en place ». Dès le début de l’affaire, le groupe d’opposition municipale pense à une action en justice. Le premier septembre, les mots se traduisent en action. Par l’intermédiaire de Pierrick Courbon, une plainte est déposée contre X pour « escroquerie à la délibération et détournement de fonds publics ». L’opposition s’attaque aux 50 000 euros de subventions municipales.

La majorité municipale est de son côté plutôt silencieuse dans un premier temps. Trois jours après les premières révélations, seule Nicole Peycelon s’exprime. Elle se dit alors « scandalisée, outrée, consternée. » Lionel Boucher, adjoint en charge des grands évènements et président de l’UDI dans la Loire (l’ancien groupe politique de Gilles Artigues) prend la parole dans une vidéo le 2 septembre. Il dénonce « le silence complice de plusieurs collègues de la majorité » dont il fait partie.

Un point de bascule

Si les réactions se succèdent au fil des révélations, l’article de Mediapart du 12 septembre est un tournant. Six minutes d’enregistrements de deux réunions qui dateraient de 2017 et 2018 sont dévoilés. Dedans on entend des voix identifiées par Médiapart comme celle de Pierre Gauttiéri et de Gaël Perdriau faire pression sur Gilles Artigues. Lorsque le premier adjoint de l’époque fait par exemple part de son intention de se défendre en saisissant le Procureur de la République Pierre Gauttiéri le menacerait : « si vous faites ça, l’ensemble des parents des élèves qui sont dans la même classe que vos enfants recevront une copie du film. » 

La majorité municipale se réunit le soir même puis fait parvenir un communiqué - signé par 42 des 47 élus - où ils condamnent « les propos ignobles tenus… ». Au même moment les élus du groupe Saint-Etienne Demain et les Communistes demandent, pour la première fois de manière officielle, la mise en retrait de Gaël Perdriau, Samy Kéfi-Jérôme et Pierre Gauttieri. Le lendemain, ils font partie des cinq personnes en garde à vue. 

Quatre jours plus tard neuf élus de la majorité regrettent le non retrait du maire et jugent indispensable le départ de Pierre Gauttieri. Le directeur de cabinet avait affirmé lors d’un entretien à TL7 qu’il « restait en poste » mais il est finalement démis de ses fonctions le mardi 20 septembre. Samy Kéfi-Jérôme démissionne trois jours plus tard. 

Deux jours plus tard, la ville de Saint-Etienne annonce dans un communiqué la mise en retrait des représentations extérieures de Gaël Perdriau. Il devrait présider le conseil municipal du 26 septembre. L'opposition qui a demandé l'ouverture d'un débat sur l'affaire en cours et adressé des questions orales si ce débat leur étaient refusé l'attend au tournant.